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Au début du siècle, Adolphe Schiltz est dessinateur au bureau technique de la maison de Wendel. Son oncle, épicier à Hayange, voit venir chez lui de nouveaux clients depuis 1897, date à laquelle les premiers immigrés d’Italie du Nord arrivent dans notre région. Ils sont de grands consommateurs de pâtes. Pour satisfaire la nouvelle clientèle, ces produits doivent être importés faute de fabrique à proximité.
Encouragé par son oncle, Adolphe Schiltz est bientôt convaincu qu’une production sur place est prometteuse. Le "Moulin-Saint-Pierre" à Ebange est à louer. Après conclusion d’un bail, le dessinateur abandonne le bureau et vient s’y établir en 1903. Du matériel est acheté et les installations sont transformées. Avec l’aide de personnes formées en Italie, compétentes dans la fabrication des pâtes, il en commence la production : c’est le succès auprès de la communauté italienne. L’entreprise devenant prospère, M. Adolphe Schiltz achète la propriété en 1905. Hélas en 1907, dans la nuit du 16 au 17 novembre, un incendie détruit l’ancien moulin, dont l’intérieur était entièrement en bois. Un bâtiment en dur, mieux adapté, est très vite reconstruit.
Les pâtes constituées d’un mélange de farine et de semoule de blé dur, sans œufs mais avec adjonction de safran pour la coloration, étaient de plus en plus demandées. Après la guerre 1914-1918, lorsque la Lorraine redevint française, la réglementation fut modifiée : la farine ordinaire disparut, remplacée par de la farine de blé dur exclusivement, provenant surtout d’Algérie.
A partir de 1926, M. Adolphe Schiltz fut secondé par son fils aîné, Georges, nouvellement diplômé d’une école d’ingénieurs des Arts et Métiers. Le premier assurait l’administration et la vente, le second la partie technique et la fabrication.
La production quotidienne variait de 800 à 2 500 kg selon qu’il s’agissait de nouilles, vermicelles, macaronis longs ou coupés, coquillettes. Une vingtaine d’employés, dont les trois quarts étaient des femmes, assuraient préparation, séchage, conditionnement et livraison. L’entreprise poursuivit sans relâche sa modernisation : une chaudière à vapeur remplaça la roue à aube en 1916. Dès 1919, des camions à bandage plein relayèrent les attelages de chevaux. Un plan d’eau d’un hectare compléta l’étang de 64 ares déjà existant. Une turbine hydraulique, installée en 1918 raccordée à une dynamo, puis plus tard à un alternateur, fut la source d’électricité jusqu’en 1934, date à laquelle la fabrique fut reliée au réseau public.
De nouvelles machines produisaient les pâtes qui étaient vendues jusqu’en Franche-Comté et en Champagne. Avec l’arrivée des Allemands en 1940, l’entre¬prise dut s’arrêter faute de matière première. L’occupant, sous la menace, obligea la fabrique à reprendre son activité après l’avoir réapprovisionnée en farine.
La production reprit en 1944, semblable à celle d’avant-guerre, fournissant les magasins de gros tel que "Fensch et Orne" (magasin de Wendel), les hôpitaux, les cantines et pour une faible part les magasins de détail. 1956 vit la fin de son fondateur. Son fils Georges assura seul toutes les responsabilités. La concurrence était devenue très vive. Il était difficile de lutter contre des sociétés de taille nationale. Malgré les efforts, la fabrique dut arrêter sa production en 1972, alors que deux hommes et six femmes constituaient encore le personnel.
Ce fut la fin des pâtes "Napoli", une des activités industrielles de Florange pendant 69 ans. M. Georges Schiltz devait décéder en 1985, à l’âge de 81 ans. Le petit-fils du fondateur transforma l’entreprise du Moulin-Saint-Pierre en négoce de produits céréaliers.
Extrait du livre "Florange 2000 ans d’histoire" - page 219
de Paul RAMBICUR et François VILLALON